
Après la sortie de At Your Birthday Party en mars 1969, Steppenwolf souhaite prendre le temps qu’il faut pour pondre un album de qualité. A l’exception du premier opus, publié en janvier 1969, les Lp suivants donnent l’impression d’un groupe entré dans la routine manquant d’inspiration. De plus il doit se remettre du départ peu de temps avant la sortie de At Your Birthday Party du guitariste Michael Monarch ne supportant plus la mainmise du chanteur John Kay. Mais le combo a pour obligation auprès du label ABC Dunhill de publier deux albums par an.
Vient donc l’idée d’aller fouiller dans les archives et dépoussiérer un enregistrement live datant du 14 mai 1967 au Matrix de San Francisco. A une époque où la formation menée par le frontman John Kay débarque fraichement dans la capitale hippie pour trouver fortune (après une virée par Los Angeles que les musiciens ont dû quitter en urgence suite à quelques bagarres). Il y a peu le combo originaire de Toronto au Canada se nommait The Sparow et comprenait le chanteur/guitariste John Kay, le bassiste Nick St. Nicholas, le claviériste Goldy McJohn, le batteur Jerry Edmonton et le guitariste Dennis Edmonton surnommé Mars Bonfire. Nous sommes en 1967 la pop music opère une grande révolution. En Angleterre les Beatles sortent Sgt Pepper’s, Hendrix avec Are You Experienced pose les bases du Hard Rock. En Californie, la fièvre psychédélique balance entre les Doors, Grateful Dead, Buffalo Springfield, Les Byrds et Jefferson Airplane. Dans cette agitation les membres de Sparow se doivent de réagir s’ils souhaitent être dans le coup. De plus San Francisco se prépare au Summer Of Love et s’impatiente de se retrouver au festival pop de Monterey. Sur une idée de leur producteur Gabriel Mekler et John Kay, le groupe se baptise finalement Steppenwolf plus rageur et plus en phase au changement musical qui s’opère. Le groupe se fait une solide réputation qui leur permet de passer dans différents clubs dont le fameux Matrix.
Le disque, intitulé Early Steppenwolf, se distingue par la face B occupé par le titre « The Pusher », une reprise du chanteur de country Hoyt Axton qui dénonce les dangers de la drogue et des dealers. Cette chanson dépassant les 21 mn débute par des sons étranges et inquiétants de tambours, de cymbales, de sombres roulements de batterie lymphatiques parfois convulsifs, de larsens, de lamentation lointaine à la voix trafiquée. Par endroit vient un bref arpège insolite ou une monté d’orgue énigmatique et dissonant voire céleste. Au bout de dix minutes de cacophonie angoissante, la musique s’installe pour un blues rampant et menaçant. John Kay et ses hommes, déchirés, tentent ici de réconcilier deux genres qui est justement en train de se séparer : le blues en question et la pop psychédélique. Ce « The Pusher » sous acide montre un Steppenwolf refusant de faire un choix dramatique entre la musique qui l’a nourri et son désir d’évasion.
Pour le reste, la face A propose 5 pistes majoritairement des reprises comme des pièces blues au registre rhythm & blues pour « Howlin’ For My Darlin » de Willie Dixon, la balade bouleversante « Corina, Corina » de Bo Carter et le boogie « I’m Going Upstairs » de John Lee Hooker avec harmonica pour un final fracassant et dépassant les 7mn. Les deux autres pistes sont des compos de John Kay, « Power Play » en ouverture et « Tighten Up Your Wig » pour du rock banal mais solide d’inspiration rhythm & blues. Bref une face sans grande originalité mais qui offre de bons moments.
Peu de temps après ce concert, Mars Bonfire quitte le groupe pour tenter une carrière solo. Mais avant de partir il offre un hit à ses compagnons de route qui va être décisif pour Steppenwolf.
Titres :
1. Power Play
2. Howlin’ For My Baby
3. Goin’ Upstairs
4. Corina, Corina
5. Tighten Up Your Wig
6. The Pusher
Musiciens :
John Kay : Chant, Guitare
Mars Bonfire : Guitare
Goldy McJohn : Orgue, Piano
Nick St. Nicholas : Basse, chœur
Jerry Edmonton : Batterie
Production : Peter Abram