Depuis les quatre ans qui se sont passées depuis la sortie de A golpe de látigo, les choses ont bien changé au sein de Ñu. Il ne reste cette fois plus que José Carlos Molina, tous les autres sont des nouveaux musiciens. On remarquera cependant le retour du bassiste Chiqui Mariscal, qui avait quitté le groupe avec Rosendo Mercado avant la sortie du premier album pour former Leño. On constatera aussi que le violoniste Jean-François André n’a pas été remplacé et c’est tant mieux: son violon donnant un rendu de trop plein aux arrangements du groupe déjà fort riches. C’est donc une formation Rock plus conventionnelle qui va donner naissance à Fuego, album qui voit le groupe madrilène assumer clairement sa volonté de sonner Hard Rock.

Les riffs bien gras de Jerónimo Ramiro dès « Más duro que nunca » ne le prouvent que trop bien. Le son est lourd, avec de discrètes réminiscences de Deep Purple dues à l’orgue, qui offrent un beau tremplin au chant – un poil moins exubérant qu’à l’accoutumée – de Molina. L’impression d’avoir un Deep Purple pachydermique et hispanique se confirme sur l’énergique « Fuego » où Molina s’époumone dans la pure tradition des Gillian et Hughes. Ce titre est un peu à Ñu ce que « Highway Star » est à la bande de Blackmore, et voit la flute caractéristique du groupe ressortir pour l’occasion et lutter avec la guitare et le synthé. Les influences progressives de Molina se réveillent sur un bref mais intense « El Hombre de Fuego » avant d’exploser sur « La Revolucion », entre Pomp Rock à la Styx et Hard Rock à la Deep Purple. Ce dernier titre est assurément l’un des sommets de l’album.

L’inquiétant « Lucifer » avec son piano désaccordé pâti hélas d’un refrain plutôt raté et caricatural et d’un rendu un peu brouillon dans sa superposition des instruments. Sur le dansant « La Bailarina » retrouve le son qui lui avait valu son surnom de ‘Jethro Tull espagnol’. Les rythmes et motifs médiévaux se mêlent agréablement aux riffs Hard Rock, la flute répondant à la guitare. On aurait aimé que le bande de Ian Anderson nous ait sorti un titre aussi réussi à la même époque. Mais la pièce maîtresse de l’album est l’épique « Los Caballeros de hierro/La Dama de la carrossa negra ». Dans sa première partie il s’agit d’un titre Hard Folk où plane une fois de plus l’ombre du Jethro Tull des grands jours avant de virer vers un Rock plus burné, entre la rage d’un Deep Purple et la mystique d’un Hawkwind. Pour terminer sur une note plus douce et calme, « Flor de Metal » est la power ballade de circonstance, avec sa montée en puissance sur un solo de saxophone menant à un très beau solo de guitare.

Fuego me semble l’album d’un groupe – ou plutôt d’un artiste (Ñu étant davantage le projet de Molina qu’un groupe à part entière) – parvenu à maturité, débarrassé de sa tendance à surcharger ses compositions. Il inaugurait des années 80 qui allaient s’avérer très riches musicalement.

Titres:
1. Más duro que nunca
2. Fuego
3. El hombre de fuego
4. La revolución
5. Lucifer
6. La bailarina
7. Los caballeros de hierro/La dama de la carroza negra (Nessa)
8. Flor de metal

Musiciens:
José Carlos Molina: Chant, flute, harmonica, percussions
Jerónimo Ramiro: Guitare
Miguel Ángel Collado: Claviers
Chiqui Mariscal: Basse
Bob Thackway: Batterie

Production: Vicente « Mariscal » Romero

Publicité